Un peu d'espoir (pv: Ermolai, Ameline, Juette, Mina, Leana)

Ermolai rentrait de la caserne, il avait terminé l'entraînement plus que rude de ses soldats. Ils étaient fin prêts. Et Ermolai était soulagé: en tant que ministre de la guerre et que chef des armées, un grand poids pesait sur ses épaules avec la venue de cet ambassadeur. Mais il avait bon espoir, tout se passerait bien. Il aperçut une jolie petite fille brune au milieu du hall. Elle avait l'air perdue. Il s'approcha et s'agenouilla, un grand sourire aux lèvres:

-Bonjour, petite fille. Tu as l'air perdue, je peux t'aider?

Autant Ermolai était un guerrier redoutable et sauvage, autant il pouvait être gentil et doux comme un agneau. Et il l'était toujours avec les enfants.

- J'attends ma mère.

*Elle étudia l'étranger avec intérêt. Elle venait d'arriver en Russie et tout lui semblait différent. Les hommes ne ressemblaient pas à ceux de France. Elle décida tout à coup qu'elle puvait faire confiance à l'étranger aux yeux de glace. Il n'avait pas l'air très amical pourtant, agréable tout au plus, mais quelque chose émanait de lui. Quelque chose qui lui faisait penser qu'elle pouvait lui faire confiance. Et puis sa mère n'était pas loin de toute façon, elle allait arriver bientôt.*

- Je m'appelle Ameline. Et toi? Est-ce que tu vis ici?

Ermolai hocha la tête:

-Moi c'est Ermolai, et oui, je vis ici. Toi aussi, tu vas vivre ici? C'est qui, ta maman?

Il trouvait que la petite avait un air très doux, très étonnant. Elle n'était pas d'ici, c'était évident. Elle avait un petit accent... Français sûrement, et qui n'était pas sans agrémenter ses mots d'un certain ton chantant peu courant par ici. Ce petit minois attentif, qui le détaillait l'amusait. Il la trouvait attachante, et pourtant, il ne la connaissait pas. Les enfants, en général, n'ont pas les masques de leurs parents, ils ont encore cette innocence qui dit "je ne te connais pas, on vient de se rencontrer, mais sin on devenait amis?".

Ermolai regarda dans la Cour d'honneur: que des visages connus, de prêt ou de loin, la magnifique duchesse d'Omsk et cette affreuse comtesse Bruks ou Brusk, il ne savait plus très bien. Mais pas d'inconnue brune et française.

- C'est moi.

*Juette s'approcha, evanescente, de sa fille qui parlait avec un homme qu'elle ne connaissait pas. Elle n'avait pas peur pour Ameline, elle savait qu'elles étaient en sécurité ici. Mais elle avait toujours ce pressentiment terrible que les choses allaient mal tourner, que le frère de son mari allait venir la chercher,... Quelque part, elle était toujours cette petite fille de 12 ans qu'on avait offert à un homme dont elle ne savait rien. Elle se rappelait de leur première nuit, du premier viol qu'elle avait subi de sa part. Un viol applaudit par tous. A 12 ans son monde de petite fille avait volé en éclats, elle avait vu les sourires sur les visages masculins, la brûlure dans les yeux de sa mère et de ses soeurs qui savaient. Elles savaient ce qu'il se passerait, le soir, même si le marché avait prévu qu'il ne la toucherait pas avant encore deux ans. Les femmes se taisaient, surtout lorqu'un noble épousait leur fille alors qu'ils n'étaient que bourgeois... Elle avait souffert et elle se méfiait à présent de la toute puissance qu'ont les hommes sur les femmes.*

Ermolai se tourna vers la voix et se redressa. Il s'inclina devant la jeune femme qui se tenait devant lui, se disant intérieurement qu'elle paraissait très jeune pour avoir une petite fille de cet âge-là:

-Bonjour Madame, enchanté. Ermolai Valavski, ministre de la guerre, pour vous servir.

Il avait remarqué la méfiance dont faisait preuve à son égard la jeune femme, et il voulait la rassurer. Après tout, il n'était dangereux que sur un champ de bataille.

-J'ai vu votre enfant seule dans la Cour, je me suis permis de lui demander qui elle était. A qui ai-je l'honneur?

- Juette d'Orléans. J'arrive de France avec Ameline. Nous n'avons pas encore bien nos marques ici. Ministre de la guerre?

*Elle se maudit d'être tombée sur un militaire. Ell détestait la violence. Mais d'un autre côté, en toute honnêteté, sa méfiance ne tenait pas tant à sa profession qu'à son sexe. Si elle était honnête avec elle même, elle devait bien s'avouer que le fait qu'il soit un homme jouait pour beaucoup plus que son métier.*

Juette, c'était un joli prénom, pas courant du tout. Il se fit la réflexion qu'il n'avait pas du faire bonne impression sur elle, elle le regardait avec une certaine méfiance.

-De France! Vous avez fait un long voyage, c'est sûrement pour cela que vous n'avez pas encore vos marques. Nul doute que vous allez vite vous habituer à la Cour de Russie.

Il ne releva pas l'air encore plus méfiant de Juette lorsqu'il annonça qu'il était soldat. Après tout, nombre de femmes réagissaient de la sorte. Mais il n'était pas sûr que la méfiance soit due à sa profession.

Mina se retourna. Elle parlait avec deux comtesses et Kassian, et avait entendu la voix de son amie, Juette.
Elle se précipita vers elle:

-Juette, alors tu es arrivée! Comment s'est passé le voyage?

Elle vit Ameline, sa fille à côté d'elle:

-Bonjour Ameline, moi, c'est Mina.

Elles ne s'étaient pas vues depuis des lustres, le temps aavit passé, mais Juette n'avait pas changé. Sauf peut-être cet air méfiant sur le visage. Mais elle savait qu'elle avait vécu l'enfer avec son mari. Il fallait lui laisser le temps.

-Vous voulez boire quelque chose?

- Oh, Mina! *soupira-t-elle d'un air soulagé* Oui, le voyage s'est bien passé. Enfin, tu sais, fatigant et éreintant, mais maintenant nous voici! C'est là le principal! Je boirais bien quelque chose, en effet!

*Ameline commençait à s'agiter et apparemment elle n'avait pas soif. Juette se dit qu'il aurait été dommage de la boucler à l'intérieur comme elle le faisait en France. Il n'y avait rien à craindre ici, elles étaient libres. Après que sa fille eut respectueusement dit bonjour à Mina, dont elle ne devait pas se souvenir étant donné qu'ell l'avait vue à sa naissance pour la première et dernière fois, elle lui dit:*

- Si tu veux, tu peux aller jouer dehors, ma puce, peut-être y a-t-il d'autres enfants dans le coin?

*Elle ne voulait pas que sa fille s'ennuie avec des adultes si elle pouvait jouer avec des enfants de son âge.*

Mina sourit et regarda parti la petite fille. Elle-même n'avait pas encore d'enfants. Après tant d'années de mariage, c'était étrange disaient certains. Mais qui sait si un miracle, un jour? Mais elle n'était pas pressée, et si elle n'avait jamais d'enfant, peu importe, finalement. Les terres iraient à un cousin de Kassian, pas de quoi en faire une montagne. Il n'était pas attaché à son domaine.

-Elle est adorable, ta fille.

Mina accompagna Juette vers un guéridon qui portait une carafe d'orangeade et lui en versa un verre.

-Vous allez vous plaire ici toutes les deux, fais moi confiance.

Elle n'osait pas aborder le sujet délicat du mari, mais elle se dit que le plus tôt serait le mieux:

-La ... La famille de ton mari sait que vous êtes ici?