Parlons du mariage

Cela faisait vraiment étrange à Anushka de remonter le couloir qui menait aux appartements de la noblesse en sachant qu'elle y était déjà à moitié installée. Depuis qu'ils s'étaient retrouvés, depuis qu'elle lui avait dit oui, elle y passait toutes ses nuits. Alors forcément, elle vivait dans l'angoisse de croiser quelqu'un dans le couloir, mais lorsque c'était le cas, elle gardait la tête haute. Elle n'aimait pas. Elle préférait de loin longer les murs et se cacher. Mais elle savait que du Ciel, sa mère la regardait avec une certaine fièreté, sa mère qui avait perdue sa vie à la Cour... voilà que sa fille y avait trouvé la sienne... Contre sa poitrine, la bague de sa mère était presque réconfortante.

Anushka poussa la porte de la chambre de Vlad sans frapper et referma derrière elle. A peine rentrée qu'elle défit son chignon en se débarrassant prestement des épingles qu'elles déposa sur la première surface plane qu'elle trouva. Elle se sentait toujours mieux les cheveux détachés, mais ce n'était pas convenable pour travailler.

- Bonsoir... chuchotta-t-elle d'une voix suave dans un sourire qui rayaonnait du plaisir de revenir auprès de lui. Tu m'as attendu longtemps? continua-t-elle en faisant chauffer de l'eau pour préparer une grosse théière de thé.

Le coeur d'Anushka se serra. Elle savait parfaitement que ce n'était pas pour lui faire du mal, mais les souvenirs des tortures qu'elle lui avait infligées la plongeait encore un peu dans la honte. Elle vint retrouver sa place entre ses bras avant de lui chuchotter contre le coeur.

- Je ne mérite vraiment pas un homme comme toi... Tu es trop exceptionnel pour mon sale carractère...

Oui, il était vraiment trop bien pour elle. Elle était à la fois fière qu'il l'ai choisie et terrifiée à l'idée de lui faire du tord... Heureusement que sa mère l'avait bien élevée. L'image du couple que formait ses parents vint se placer devant ses yeux, comme une promesse.

Elle ne pouvait pas vraiment répondre à cela. De toute façon, tant qu'elle lui dirait qu'il était trop bien pour elle, il continuerait à lui montrer ostensiblement qu'elle le mérite. Alors elle se contenta de lui sourire tendrement avant de s'arracher à ses bras pour terminer le thé.

- Dis, j'ai oublié de te demander si tu avais mangé... Je peux redescendre en cuisine si tu veux. Sauf si tu as tes propres réserves ici...

Bien que ce fut la moindre des choses qu'elle pouvait faire, Anushka puisait une espèce de réconfort dans ces petites intentions simples. Elle était destinée à épouser Vlad, alors autant qu'elle veille à ce qu'il ne manque rien à sa façon. C'était un réflexe stupide, qu'elle avait hérité de sa mère. Sa mère avait toujours une recette miracle pour gérer chaque situation, les peines de coeur des garçons, les maladies, les hivers rigoureux, les jours d'inquiétude, les jours de fête. Avec autant d'enfant, c'était le seul rituel qui revenait trois fois par jour et qui rassemblait toute la famille.

- Comment s'est passée ta journée?

Anushka sentait le regard de Vlad sur elle. Il voulait lui dire quelque chose, elle pouvait le sentir, mais ne voulait pas le brusquer. D'où la question tellement ouverte que cela lui permettait d'amener le sujet qui le turlupinait sans trop de mal.

Anushka frémit légèrement en entendant la réponse de Vlad. Les mots en eux-mêmes n'étaient pas méchant du tout, mais il y avait une légère scheresse qui la surprit. Ah les soldats ! pensa-t-elle interrieurement. Elle lui sourit tendrement.

- Amour et eau fraîche? Après tout pourquoi pas... Je ne connait de très bon assaisonnement pour cela, mais je crois que c'est meilleur nature. Mais dis-moi, y-a-t-il une raison particulière à autant de bonne humeur? lui demanda-t-elle en croisant les bras sur sa poitrine, la tête légèrement penchée et un drôle de sourire en coin sur lèvres.

Anushka se fondit littéralement dans son étreinte. C'était comme si ses bras avaient toujours été destinés à venir s'enrouler autour d'elle, comme si son visage avait été déssiné pour venir se lover juste contre son coeur. Elle marqua un temps de pause, ne pouvant plus respirer, tellement elle était affairée à calmer son coeur qui voletait à présent dans sa poitrine tel un papillon face à une torche. "Oh mon Dieu..." pensa-t-elle devant la merveille qui se passait en elle à chaque fois qu'il était près d'elle. Sans qu'Anushka ne s'en rende compte, il lui était devenu aussi essentiel que le soleil, la lune et les étoiles réunies.

Elle expira doucement, la respiration tremblottante due à l'émotion, avant de relever doucement ses yeux vers les siens.

- Ca me ferait très plaisir d'en parler tout de suite, souffla-t-elle doucement.

C'était un euphémisme. C'était "nécéssaire" d'en parler tout de suite, comme le disait sa mère, cela ne pouvait pas ne pas être... comme eux deux. A cet instant précis, s'il lui avait demandé de courrir chez elle demander le consentement d'Andrei, elle l'aurait fait; s'il lui avait demandé de l'épouser tout de suite sur le champ, elle l'aurait fait; s'il lui avait demandé d'aller réveiller le Tsar pour lui demander sa bénédiction, elle l'aurait fait.

Ses jambes se mirent à flageoler. He bien... elle avait belle allure ! Totalement à la mercie de cet homme qui avait pris son coeur en ôtage, elle qui ne répondait que de ses propres lois... Anushka sourit à ctte idée, au tableau qu'ils formaient, à la légère transformation qui s'était opérée en elle, comme une fleur qui termine de s'ouvrir, gardant toute sa force mais aussi en grandissant... Et même si tout de suite, elle ne l'aurait avoué à personne d'autre que lui, elle aimait ce qu'elle voyait.