Une journée en enfer

Anushka avait courru aussi vite qu'elle avait pu. Elle n'avait pas vraiment tenu à se faire repérer à la sortie du palais, mais dès qu'elle avait été hors de vue, elle s'était mise à courrir comme une dératée. La descente en ville n'était pas des plus courtes, mais cela lui était égale. Elle avait ignoré les regards des autres... celui étoné des femmes de petite vertue qui racolaient, celui interressé des hommes qui cherchaient de la compagnie, celui beaucoup plus carnassier de ceux qui avaient beaucoup plus dangereux en tête.

Pourtant elle avait déambulé à travers les rues de la ville avec pour seul phare son angoisse. Celle de ne pas le trouver en arrivant. Celle que la brasserie soit fermée depuis longtemps. Celle qu'il ne veuille plus d'elle parce qu'elle avait trop tardé. Elle avait la poitrine en flamme par la peur. Et si elle avait gâché sa dernière chance de tout arranger avec Vlad? Et s'il ne voulait vraiment plus d'elle? Que ferait-elle s'il lui disait qu'il était trop tard. Qu'il l'avait attendue trop longtemps, qu'il nepouvait plus l'attendre... Qu'elle aurait du venir trente, ving, dix, trois minutes plus tôt?

Pourrait-elle vivre avec cette certitude qu'elle avait piétiné elle-même son propre bonheur, leur bonheur? Y survivrait-elle? Et lui?

Anushka arriva en face de la brasserie pour voir les lumières à l'interrieur s'éteindre, et la porte se refermer. Comme si c'était devenu une habitude ces derniers temps, son coeur cessa de battre.

Il était trop tard. Vlad était parti. C'était fini. Elle avait tout perdu. Vlad avait abandoné.

Elle ne lui en voulait pas. Elle se haïssait trop pour lui en vouloir. Il se mit à pleuvoir, comme si les cieux avaient percu que son âme venait de s'éteindre. L'eau coulait sur son visage, dissolvant le goût de sel sur ses lèvres. Fiches larmes.

Respirer faisait à présent tellement mal. Elle avait, grandissant au fond du ventre, un serpent qui la dévorait. Petit à petit. Il ne pouvait pas prendre son coeur, Vlad l'avait déjà emmené. Alors, avec une lenteur qui la mettait au supplice, le serpent lui dévorait les entrailes... elle savait que le serpent serait sa seule compagnie jusqu'à la fin des temps. Son seul compagnon, écho de sa culpabilité.

Alors, elle restait debout, sous la pluie, sous la lumière faible de l'éclairage publique qui lui détruisait les yeux. Elle attendait que la mort la prenne.

Elle avait tout perdu.

Elle lutait pour respirer. Elle lutait de toutes ses forces. Sa poitrine se soulevait avait autant de difficulté que si un poids terrible y avait été déposé. Elle se sentait brisée de l'interrieur. Elle aurait acceuillit n'importe quel homme pour qu'il vienne finir le travail qu'elle avait commencé, qu'il mette fin à cette vie qui n'avait plus de sens.

Elle apperçu vaguement une silhouette... mais à travers le rideau de la pluie et de ses larmes, c'était dificile à dire. Pourtant, elle entendit son prénom prononcé dans la nuit. Pas son prénon rarement utilisé, pas son surnoms que tout le monde connaissait, non. Le nom qu'utilisait Vlad quand ils étaient seuls... le nom qu'utilisait Vlad quand ils parlaient ensembel... le nom qu'utilisait Vlad quand il l'aimait.

Elle voulait lui répondre, mais ses mots étaient coincé dans sa gorge. Ils ne voulaient pas sortir, comme si le serpent qui voulait sa mort mordait dedans et les empêchait de franchir le seuil de ses lèvres. Son corps ne bougeait pas. C'était une torture, il était là, à quelques pas d'elle et elle ne pouvait rien faire. Rien.

Mais Anushka ne pouvait pas laisser le serpent lui dévorer le ventre. Laisser le serpent régenter sa vie était du suicide, et elle ne voulait pas mourir. Elle fit un pas vers lui. Un autre. Et petite à petit, elle se raprochait de sa vie. Pitié, faites qu'il fasse un signe qu'il la voulait encore. Elle ne demandait qu'un seul geste.

- Vlad!

Elle avait lutté contre le serpent qui avait laissé échaper ce seul et unique mot. La suite, c'était son coeur qui l'avait fait tout seul alors qu'il se remettait à battre follement, rendu ivre par l'espoir qui renaissait. Peu importait qu'il la rejette. peu importait qu'il la mette à terre et qu'il la foule aux pieds. Anushka n'étais plus complète qu'avec Vlad. Il était son absolu, le centre de son monde, l'âme de sa vie, la lueur de sa nuit.

Elle se mit à courrir vers lui comme une forcenée. Elle manqua de tomber le nez dans la boue mais se rattrapa in extremis. Elle courrait vers le seul endroit auquel elle appartenait, vers son seul foyer. Anushka vint se loger avec force entre les bras de Vlad. Elle l'aurait bien regardé dans les yeux, mais elle pleurait tellement que cela aurait été inutile. Au lieu de cela, elle le serra tellement fort dans ses bras que leurs deux corps ne faisient plus qu'un. Elle aurait donné tout le reste de sa vie pour qu'il la serre en retour, qu'il l'accepte.

- Oh Vlad! Je suis tellement désolée. Oui, oui, oui, je t'aime.Plus que ma vie, plus que mon honeur, plus que mon orgueil, plus que tout le reste... même ma liberté! Je ne suis rien sans toi. Tu es la seule chose importante de ma vie. Je t'en prie, dis-moi qu'il n'est pas trop tard! Dis-moi que j'ai encore une chance... Je serais ce que tu veux. Je serais ton esclave, ton ombre...

Ansushka du reprendre son souffle, ses sanglots rendant ses paroles encore plus incohérentes.

- Je sais que c'est contre toutes les règles, et ca m'est égal. Je refuse de vivre comme cela! Les gens diront ce qu'ils voudront... Je suis morte de trouille, mais je suis prète, Vlad... Si tu veux encore de moi...

Son coeur bat trop fort dans ses oreilles, mais les mots de Vlad l'atteignent au plus profond d'elle-même. Elle redressa la tête pour planter ses yeux dans les siens.

- Oui. Je veux t'épouser, je veux devenir ta femme, vivre avec toi jusqu'à la fin. Dis-moi juste que tu ne fais pas cela par contrainte. Je ne supporterais pas d'être un poids pour toi. Nous deux, cela veut dire le monde pour moi. Mais je ne veux pas que tu ne m'épouse qu'à cause de Grisha.

Elle aurait pu se noyer dans ses yeux, dans ses bras, dans son être. Mais elle était sincière. Malgré tout ce que Grisha pourrait bien dire, son honeur lui apparatenait. Elle vivait, certes dans le péché, avec un homme qu'elle aimait plus que sa vie. Et pour cette seule raison, son honeur était sauf. Ni les hommes ni les Dieux ne pourraient changer ce qu'elle ressentait. S'il le voulait, elle serait son éternelle amoureuse. Elle serait terriblement honorée d'être sa femme, mas elle ne l'y obligerait pas.

- Madame Valakovna... Anushka Valakovna... Moi ca me va! Je trouve que ça sonne bien!

Elle étudia avec un sourire tendre le visage qu'elle verrait à présent tous les jours jusqu'à la fin de sa vie. Anushka l'embrassa doucement, de ses lèvres où la pluie et les larmes c'étaient mêlées, son coeur tellement enflé de bonheur qu'elle aurait pu s'envoler. Puis elle arracha doucement ses lèvres des siennes.

- Je suis désolée de t'avoir fait tout cela... J'ai peur que tu n'épouse la femme la plus imprévisible de Russie...

Anushka luta contre sa peur.

- Enchantée, Comte Valako... répondit-elle tremblante.

Comptesse Vlakova... Cela la fit frissonner. La pluie n'y était pas vraiment pour rien non plus. Elle allait avoir un bout de chemin à faire, mais elle ferait tout pour ne pas le déçevoir. Et elle savait qu'il lui laisserait le temps qu'il faudrait. Quand elle ne faisait pas sa tête de mule, il était le plus patient des hommes.

- On rentre? lui demanda-t-elle.

Parce qu'au final, elle était épuisée, physiquement et nerveusement. Et lui avait passé toute la journée à l'attendre, il ne devait pas être plus en forme qu'elle. Tout ce à quoi elle aspirais, c'était une bonne et longue nuit de sommeil entre ses bras. Dormir... enfin.